Ernesto Guevara dit le Che, L'internationalisation de la Révolution
Le divorce avec Cuba
Déjà le destin attire le Che ailleurs, et il se désolidarise peu à peu de Moscou dont il finira par critiquer, indirectement mais violement, la politique de coexistence pacifique qui ne peut pas exister selon lui entre pays exploiteurs et pays exploités lors d'un discours anti-yankee prononcé aux Nations Unies.
Fidel examine le passeport du Che peu avant son depart |
Après son virulent plaidoyer, le Che continue sa tournée diplomatique en Afrique avant de revenir à Cuba. A son retour, Fidel l'attend et une discussion animée entérine la rupture entre les deux hommes, non tant idéologique (Castro a lui aussi critiqué Moscou à cette époque) que liée aux obligations de Cuba envers son « grand frère » russe dont il ne peut plus se passer. Peut-être Fidel a-t-il du mal à supporter que le Che parle au nom de Cuba, lui qui veut que Cuba s'exprime d'une seule voix, la sienne; peut-être a-t-il a du céder aux pressions russes pour mettre le Che discrètement hors jeu. Quoi qu'il en soit, le Che quitte Cuba, renonce à sa citoyenneté, à son grade de commandant et à son titre de ministre. Le divorce est consommé. |
Le Che expliquera plus tard qu'il avait quitté Cuba pour propager la révolution au monde entier. Il a en effet tiré les leçons de l'échec de l'indépendance économique de Cuba, qui a finalement troqué un maître pour un autre. En effet si Cuba ne pratique plus la monoculture de la canne à sucre, l'extension trop rapide de la polyculture a fait baisser la production ; et si l'industrialisation rapide a créé de nombreuses usines neuves, la production n'est pas de bonne qualité et très coûteuse, parce que les ingénieurs ont quitté le pays et que les techniciens issus du prolétariat ne sont pas encore prêts, mais surtout parce que Cuba ne dispose pas des matières premières et que les importer coûte une fortune. Cuba affronte encore une fois les dures lois du marché mondial, et le Che en tire la conclusion qu'il est impossible de construire le socialisme dans un seul pays. Il a compris que la seule solution résidait dans l'extension de la révolution au monde entier, car si d'autres pays prenaient la voie de Cuba, des échanges économiques justes et équitables, cette fois, permettraient à tout un chacun de combler les lacunes respectives au niveau économique.
Le Che a construit sa dialectique révolutionnaire, 1. La révolution ne peut être que nationale dans un premier temps, mais elle ne peut survivre et construire le socialisme que si elle s'internationalise ; 2. Chaque victoire de la révolution dans un pays renforce l'ensemble du mouvement révolutionnaire.
Le Che aurait donc quitté Cuba, non pour quelque histoire d'ego romantique, mais parce qu'ayant constaté l'échec pratique de la révolution cubaine, son modèle théorique demandait un engagement plus large que celui du cadre de la révolution cubaine, et comme chez lui théorie et pratique sont inséparables, il part donc aider la révolution internationale, et ce faisant, il continue à aider son petit frère cubain. Une lettre du 3 octobre 1965 expose son plan pour le futur : "...Je sens que j'ai accompli ma part du devoir qui me liait à la révolution cubaine [...].Je laisse ici la part la plus pure de mes espoirs de bâtisseur et ce que j'ai de plus cher parmi les êtres que j'aime...".
L'aventure congolaise
En 1965, tout le monde se demande où est le Che. Il a quitté Cuba et s'est embarqué avec des guérilleros cubains pour le Congo, afin d'essayer d'allumer un second foyer révolutionnaire. Sa connaissance du Congo remonte à un an plus tôt, quand, aux Nations Unies, il avait pris à partie l'Impérialisme, belge notamment, qui avait décidé l'assassinat de Patrice Lumumba, dirigeant socialiste, et la mise au pouvoir de Mobutu (Discours aux NU où il dit : « Tous les hommes libres du monde doivent s'apprêter à venger le crime du Congo »). Mais la rivalité des groupes rebelles congolais, l'inertie des dirigeants révolutionnaires locaux qui préféraient se la couler douce en Europe et le manque de moyens, vouent à l'échec une entreprise qui apparaît avec le recul par trop volontariste et trop légèrement préparée. Des facteurs extérieurs rendent cette aventure encore plus improbable : Les soviétiques en bonne entente avec les Etats Unis soutiennent Mobutu et demandent aux cubains de rapatrier leurs hommes et la Chine, qui est en froid avec Cuba, demande aux révolutionnaires congolais qu'elle appuie de renvoyer les cubains. Après 11 mois, le Che décide de revenir vers des terres moins exotiques.
Le Che au Congo |
Le Che au Congo |
Le Che au Congo avec Dreke et Zerkera |
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