Ernesto Guevara dit le Che, La Révolution Cubaine

Selon ses propres mots, ce n'est pas un débarquement, mais un naufrage qui attend la jeune révolution cubaine et lors du premier accrochage avec l'armée régulière, les troupes de Fidel sont décimées et ce sont 12 révolutionnaires dépenaillés qui vont se réfugier dans les montagnes où ils lient connaissance avec les paysans. Ceux-ci sont étonnés d'être bien traités par des hommes en armes, qui paient leur nourriture, qui les soignent, leur construisent des écoles et leur apprennent à lire. La communion d'intérêts entre les révolutionnaires et les paysans, pour la plupart des ouvriers agricoles exploités dans les grandes plantations US sera l'un des éléments important pour la réussite de la lutte. La révolution se prolétarise, et nombre de guérilleros comprennent que la révolution sera autant sociale que politique. Dans ses «Souvenirs de la guerre révolutionnaire», le Che explique ce processus: «Cette conscience que nous avions de la nécessité d'un changement définitif dans la vie du peuple commençait à prendre corps. L'idée de la réforme agraire se fit plus impérieuse et la communion avec le peuple cessa d'être une théorie pour devenir à tout jamais une partie de notre être. La guérilla et les masses paysannes, petit à petit, se fondaient en un tout homogène, sans qu'il soit possible de dire à quel instant précis de la longue route se produisit la fusion». Les « Barbudos » (barbus) comme on les appelle voient leurs rangs grossir, non seulement avec ces paysans sensibilisés à la révolution, mais également par les nombreux guérilleros venus des différentes organisations révolutionnaires urbaines avec les quelles Fidel et ses hommes entretenaient des rapports réguliers.

Le Che apprend à devenir un chef, un « Commandante » et Fidel en dira qu'il était « un artiste de la Guérilla, un chef aussi exigeant avec lui-même qu'avec les autres, qui pratique une morale égalitaire qui donne son sens à la lutte contre une dictature de corrompus ». Quand il ne se bat pas, il soigne ou donne des cours d'alphabétisation ou de français. S'installe une lutte armée avec les troupes régulières où les troupes révolutionnaires emportent des victoires et, peu à peu, contrôlent un vaste territoire.

En juillet 1957, le Che est nommé « Commandante », grade le plus élevé de la révolution. Il travaille sans relâche, ouvrant successivement l'émetteur radio « El Rebelde » (le rebelle) et fondant le journal « El Cubano Libre » (Le Cubain Libre). A travers ces deux médias, les messages sont simples et deviennent rapidement célèbres : « La libertad o la muerte » (la liberté ou la mort), « Hasta la Victoria, siempre » (Jusqu'à la victoire, toujours). La révolution crée des manufactures d'armes, des services d'approvisionnement, des cliniques, de petites industries, une boulangerie, instaure des lois et mène un réforme agraire (expropriant les grands propriétaires terriens), bref, c'est un mini-Etat qui se met en place. Pour régler leurs achats, les révolutionnaires utilisent des coupons signés « Che », système que Guevara utilisera encore quand il deviendra directeur de la banque centrale après la prise de pouvoir de Fidel Castro.

Le 21 août, sur ordre de Fidel Castro, commence l'invasion du reste de l'île, et les victoires se succèdent malgré le rapport de force négatif pour les hommes de Fidel. Les révolutionnaires ne compteront jamais plus de 5000 hommes et femmes, alors que l'armée de Batista en compte 70.000 et peut compter sur l'aide du « grand frère américain » en armes, munition et instructeurs. En décembre 1959, le Che traverser les montagnes, les marécages et. deux cyclones à la tête d'une colonne de 220 hommes. Sur la route de la Havane, ils sont rejoints par d'autres groupes révolutionnaires et attaquent la dernière grande forteresse de Batista avant La Havane, Santa Clara. En face, l'armée régulière oppose quelques milliers d'hommes et un train blindé considéré comme l'arme secrète du gouvernement. Les hommes du Che font dérailler la locomotive et des commandos suicides arrosent les wagons blindés de cocktails Molotov, le transformant peu à peu en four ; la garnison l'abandonne et se rend. En décembre, la révolution emporte la bataille décisive de Santa Clara et libère la ville. A Noël, Batista fuit en République Dominicaine, et les révolutionnaires font leur entrée triomphale à La Havane le 2 janvier 1959. Sur la route de La Havane, le Che est interpellé par un guérillero qui demande à pouvoir rentrer chez lui sous prétexte que «nous avons gagné la révolution». Le Che refuse sèchement: «Nous avons gagné la guerre, mais la révolution ne fait que commencer»...

En chemin, le Che a aussi rencontré sa deuxième femme, la blonde Aleida March, il a 30 ans.

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